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La mort de l’asile. Histoire de l’antipsychiatrie
Auteur(s): Jacques Lesage de La Haye - éd. Libertaires, 2006
(213 p. ; 10 €)
http://www.lien-social.com/article.php3?id_article=1285&id_groupe=7
Il y a peu de chance pour que ce livre fasse la Une des médias
ou que son auteur soit invité dans l’une de ces émissions
à la mode où se fabriquent les best-sellers. Au contraire
même ! Pour peu que son existence soit remarquée, il
y a fort à parier que le livre sera critiqué, raillé,
marginalisé et jeté aux rancards de l’histoire
par ceux-là mêmes qui, comme son auteur, furent un
jour sur les barricades de mai 68 et engagés dans tous les
combats contre toutes les formes d’enfermements : du Goulag
ou des camps de concentration, de l’asile ou de la prison.
« Non seulement, l’hôpital psychiatrique est dénoncé,
mais en plus, cette remise en cause est insérée dans
la contestation de la société toute entière.
C’est le système capitaliste qui est critiqué
» (p.43).
Ce livre est le témoignage de toute une époque que
l’on a de la peine à imaginer aujourd’hui, non
pas qu’elle fut lointaine puisque moins d’une cinquantaine
d’années nous en sépare, mais parce que plus
personne n’ose la raconter. Cette époque-là
est pourtant celle des luttes contre une violence exercée
par des hommes sur d’autres hommes en toute impunité
puisqu’elle se commettait en principe pour les guérir,
et donc pour leur bien. Dans le sillage de Ronald Laing, en Grande-Bretagne,
ou de David Cooper, aux États-Unis, Jacques Lesage de La
Haye appartient au mouvement français de l’antipsychiatrie
qui, à partir des années 60, dénonce l’asile
comme étant le symbole des enclaves totalitaires. Pour ce
mouvement-là et ses rares défenseurs, ils seront peut-être
moins d’une demi-douzaine dans les années 90, il n’y
a pas d’autres manières de défendre la psychiatrie
que de supprimer l’asile. Ce point de vue est le reflet d’un
combat idéologique extrême, mais qui pourtant jamais
ne méprise, même s’il les critique, les choix
d’un réformisme portés par François Tosquelles
et Félix Guattari (la psychiatrie institutionnelle), Lucien
Bonnafé (la sectorisation) ou bien encore Claude Sigala (à
travers la création des lieux de vie). Pour un lecteur contemporain,
il paraît difficile voire impossible d’adhérer
sans condition aux positions et aux propos tenus par l’auteur,
mais n’est-ce pas là justement la valeur et l’intérêt
d’un tel écrit. En retraçant l’histoire
idéologique et politique de la psychiatrie, Jacques Lesage
de La Haye éclaire d’un regard nouveau l’état
pitoyable dans laquelle celle-ci se trouve aujourd’hui. Et
rien que pour cela, l’auteur et son livre valent le détour
! Par ailleurs, il n’y a pas tant d’ouvrages sur l’histoire
récente de la psychiatrie pour bouder la lecture de celui-ci.
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